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Entretien avec Thierry Sinda sur le « 19e Printemps des Poètes des Afriques et d’Ailleurs »

Publié le Mardi 15 Mars 2022
Entretien avec Thierry Sinda sur le « 19e Printemps des Poètes des Afriques et d’Ailleurs »

Le 19e Printemps des Poètes des Afriques et d’Ailleurs se tiendra à Paris du 25 au 27 mars 2022, le thème est « L’éphémère pauvreté, la poésie s’engage en Micro-crédit-relais ». Il a pour parrain l’éminent poète et historien Martial Sinda. Il est animé par l’acteur et metteur en scène Moa Abaïd. Rencontre avec le poète et universitaire Thierry Sinda, président-fondateur de cet événement poétique et initiateur du Micro-crédit-relais.

Pourquoi tenez-vous à cet événement littéraire indépendant ?

Thierry Sinda : "Chaque génération doit, dans une relative opacité, affronter sa mission : la remplir ou la trahir " disait le penseur Martiniquais Frantz Fanon. Nous remplissons la nôtre dignement, nous nous inscrivons dans le militantisme culturel à la suite du romancier guyanais René Maran, lequel dénonça en 1921 les horreurs du colonialisme  dans Batouala, véritable roman nègre, lequel eut pour relais directs : les sœurs Nardal ( en 1931 avec La revue du monde noir), le poète guyanais Léon Gontran Damas ( en 1937 avec Pigments), le poète martiniquais Aimé Césaire (en 1939, avec Cahier d’un retour au pays natal), le premier poète de l’ AOF Léopold Sédar Senghor (en 1945 avec Chants d’ombres), le premier poète de l’AEF Martial Sinda (en 1955 avec Premier chant du départ), et tous leurs compagnons de lutte de la Négritude, lesquels ont œuvré avec force, et à leur risques et périls, pour la dignité de l’homme noir et de sa culture à une époque où le Noir était considéré par des pseudo-scientifiques comme le chaînon manquant entre le singe et l’homme. De toute évidence, la Négritude n’est pas une question de « tigritude » mais de luttes sérieuse, fondamentales, tout comme  l’étaient celles des Poètes casqués de Pierre Seghers qui ont lutté pour bouter en dehors de la France les occupants nazis. Nous gardons la flamme animée par un solide travail de mémoire et par la dénonciation de la condition inégalitaire du Noir au XXIe siècle, d’où la notion de Néo-Négritude que j’ai initiée en 2004, et dont le Printemps des Poètes des Afriques et d’Ailleurs en est la défense et l’illustration. D’autres plus jeunes continuerons le combat, en refusant de trahir leur mission, j’en suis plus que persuadé.

Le thème du 19e Printemps des Poètes des Afrique et d’Ailleurs est « l’éphémère pauvreté, la poésie s’engage en Micro-crédit-relais» ! Pensez-vous réellement que la pauvreté soit éphémère ?

TS : Tout est relatif. Permettez-moi de vous répondre en vous livrant en avant-première un extrait de mon tout récent poème « La pauvreté éphémère » : « Le poète Rêve / dans l’Ephémère /Et l’éphémère /est le Reflet / de la Réalité // Qu’est-ce que la pauvreté /à l’échelle du Temps de l’Humanité ?/Qu’est-ce que la pauvreté /à l’époque de l’Homo sapiens / sapiens / où les victorieux primo-hommes nomades / vivaient clairement en harmonie /avec la clémente nature / sans le moindre désir/de futiles et irréels / biens  matériels /ALIENANTS/ […]Qu’est-ce que la Matérielle Pauvreté / face à l’intérieure richesse? / La pauvreté n’est point statique /La pauvreté est libre comme le pur air /La Pauvreté excelle / La pauvreté n’exclut pas l’Excellence // COMBIEN d’artistes / et  de poètes maudits /d’ANTAN / ont nourri / l’immensité   de   l’Humanité// Les possédants /  dépossédés /et les non-possédants /possédés// défilent/dans les musées/ défilent/  dans les bibliothèques /sans cesse /  sans cesse/ pour  gaiement/  se nourrir /  de  leurs  nourritures  célestes », etc. je pense que vous avez saisi l’idée. Je prépare sur la question une anthologie Poèmes sur la pauvreté de Victor Hugo à Aimé Césaire, suivi de l’essai Une idée nouvelle le Micro-crédit-relais. Ce sera d’ailleurs le thème de ma communication le 27 mars à la Société des Poètes français, sise au Quartier Latin.

 Pouvez-vous nous rappeler brièvement l’idée nouvelle du « Micro-crédit-relais » que vous avez initiée et dont nous avons parlé lors d’un précédent entretien ?

 TS : C’est une notion exclut la seule réussite individuelle. Elle s’inscrit dans une dynamique de réussite collective d’un groupe de huit à dix personnes. Cette idée nouvelle est  prioritairement  tournée vers les plus démunis. Grâce à la solidarité des dons du Nord, nous créons un groupe solidaire formé des plus démunis  futurs micro-entrepreneurs du Sud se trouvant dans un même lieu. On octroie un Micro-crédit-relais (pour nous à fonds perdus) à un futur micro-entrepreneur, lequel avec  ses bénéfices remboursera en dotation de création de capital un deuxième futur micro-entrepreneur, qui rendra la pareille à un troisième futur micro-entrepreneur, et ainsi de suite jusqu’à la création en chaîne de dix micro-entreprises dotées d’un capital identique, et faisant des bénéfices. Je présenterai le Micro-crédit-relais dans une ambiance sympa, autour d’un bon plat de Maboké le vendredi 25 mars dans le restaurant Mienandi dans le fameux quartier africain de Paris appelé Château-Rouge.

 Le troisième jour de votre week-end de la poésie des « Afriques et d’Ailleurs » se déplace à La librairie La lucarne des écrivains. Qu’avez-vous au programme ?

 TS : Le samedi 26 mars dans la librairie avant-gardiste du 19e arrondissement de Paris, La lucarne des écrivains, nous feront la part belle aux femmes. Nous aurons un premier hommage à Moune de Rivel, une grande dame de la chanson créole, actrice, diseuse de poésie et muse des poètes de la Négritude. Le poète Gilles M’Arche en sera le maître de cérémonie. Le second hommage au féminin sera rendu à la poétesse, récemment décédée, Sophie Cerceau qui a publié dans de nombreuses anthologies, dont la mienne : Anthologie des poèmes d’amour des Afriques et d’Ailleurs. Nous lirons collectivement ses poèmes. Dans un troisième temps nous donnons carte blanche au cinéaste, dramaturge, et écrivain martiniquais Julius-Amédée Laou autour de son livre : La Métropole : le pays des grands et beaux bwanas ».Ensuite suivra, comme durant tous les jours de notre alléchant week-end poétique, des scènes ouvertes où pourront s’exprimer tous les poètes et artistes qui le souhaitent.

 Quels sont les invités de cette nouvelle édition ?

TS : En musiciens nous aurons le directeur artistique Moa Abaïd, multi-instrumentaliste,  et l’auteur-compositeur-interprète Pascal Batista. Parmi les poètes on peut citer : Pascale Rabésandratana (alias Pascale Coutoux, qui est aussi l’auteur de la très belle aquarelle de l’affiche du festival : La petite vendeuse de bananes de Tuléar), Henri Moucle, Alain-Alfred Moutapam, Rocky Rabaraona, Daniel Illemay, Cheryl Itanda, Ivydall, Michel Brissac, Marie-France Danaho, Francine Ranaivo, Giselle Déloumeaux, Michaël Udofia, Jean-Baptiste Tiémélé, Romuald Chery, Hanitr'Ony, Amadou Gaye, Léo Zelada, Cécile Aveline-Collot…

Programme complet sur www.neonegritude33.afrikblog.com

Entretien réalisé par Entrecongolais.com

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