
Dany Bitsindou, technicien des Caisses de Sécurité sociale en France et consultant en développement solidaire, publie un livre sur la Sécurité sociale du Congo-Brazzaville aux éditions Les Lettres Mouchetées.
Le livre se structure en trois parties bien équilibrées : un aperçu, une analyse et des perspectives. Si dans l’aperçu général l’auteur rappelle l’origine coloniale et traditionnelle du système de Sécurité sociale – dès 1956, il existait une « Caisse de compensation et des allocations familiales », devenue par la suite « la Caisse Nationale de Sécurité Sociale », dont la philosophie est de concilier traditions sociales et préceptes universels de l’assistance publique – , dans la deuxième partie il analyse davantage la relation de service des Caisses, « une relation unidimensionnelle constituée par des espaces d’accueil physique – les seuls segments d’accès aux droits –, aménagés dans chaque agence, où s’accomplissent les formalités de demande de prestations et d’échange de données entre les usagers et les Caisses »...
La troisième partie, elle, est beaucoup plus contributive au débat sur la Sécurité sociale au Congo. Dany Bitsindou part de la problématique des prestations de la « Caisse de la Famille et de l’Enfance en Difficulté ». Peuvent-elles être accessibles à toutes les familles pauvres ? se demande-t-il. Cette question, estime-t-il, est indiscutablement dans l’ordre des évolutions structurelles de l’institution en vue de la production des droits consacrés aux familles en difficultés. Du point de vue « intention sociale », les politiques publiques destinées à la famille constituent toujours une avancée majeure, puisqu’elles intègrent un profil nouveau des bénéficiaires. « En consacrant aux familles en difficultés des allocations, l’État fait un serment de prise en compte des vulnérabilités sociales, s’engage à définir les conditions de son assistance par des financements conséquents. Au sens logique de protection sociale, l’évolution vers un modèle universel soustrait une inégalité dans l’accès aux prestations familiales, celle qui restreint les allocations aux cotisants sociaux et ayants-droit, et accorde implicitement une double sécurité sociale à cette catégorie de la population à la fois pourvue de revenus salariaux et subsidiaires au titre des risques sociaux. L’État corrige donc la disproportion qui existe entre les familles des cotisants, bénéficiaires d’allocations, et celles des non-cotisants, exclues du champ des prestations légales ou sans prestations », soutient-il. Toutefois, attenue-t-il, dans un environnement social qui ne garantit pas complètement l’égalité, les conditions de redistribution des droits soulèvent quelques inquiétudes sur l’accès de toutes les familles vulnérables à ces prestations. En témoigne l’allocation Lisungi. Ce programme, effet, dans l’esprit de son utilité sociale, venait financièrement en aide à des foyers pauvres et devait couvrir plus de la moitié de la population congolaise, laquelle vit dans la pauvreté. Mais lorsque l’on sait que 70% d’entre elle vit en zone rurale, par quel critère social avait-on décidé de sa mise en œuvre dans une localité, en excluant du champ des bénéficiaires les populations pauvres d’une autre localité ? Puisque de Pokola à Sibiti en passant par Djambala, à titre d’illustration, l’incidence de la pauvreté sur la condition de vie est identique ?
Partout ailleurs, poursuit-il, « l’horizon de la Sécurité sociale est tributaire de la place de l’humain et du sens de la solidarité nationale dans la construction des politiques sociales. Cela signifie une démarche à la fois citoyenne et institutionnelle visant à déconstruire les fondements des inégalités pour faire émerger le modèle universel de la Sécurité sociale. (…) Il s’agit de considérer la protection humaine comme facteur de développement économique pour lequel l’investissement doit être permanent et perpétuellement adapté aux besoins sociaux ». Bien évidemment, cela se traduit par un investissement social sur l’ensemble du parcours de la vie humaine, c’est à dire de la naissance à la vieillesse en passant par la constitution de la famille, l’accès à l’emploi et à un logement décent, la conciliation de la vie professionnelle et la vie familiale...
Entrecongolais.com
ISBN 1095999931
Nombre de pages : 94
Prix : 17 euros