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Congo-B-Tribune : « Thierry Moungalla, « un orgue de barbarie » qui ne convainc personne » (Jean-Raphael Oyabi)

Publié le Lundi 18 Octobre 2021
 Congo-B-Tribune : « Thierry Moungalla, « un orgue de barbarie » qui ne convainc personne » (Jean-Raphael Oyabi)

La tempête soulevée par le documentaire de France 2 sur «les Pandora papers » - une immense fuite de données qui a révélé les noms de nombreuses personnalités utilisant des paradis fiscaux pour blanchir de l’argent ou ne plus payer d’impôts -, est loin de baisser d’intensité au Congo-Brazzaville. Une affaire où, sans surprise, le nom de Sassou est cité. Comme pour faire diversion, c’est le ministre de la Communication, Thierry Moungalla, qui a été appelé à la rescousse. Echec et mat.

Un écrivain congolais écrit dans son roman que « les hommes politiques sont en général des magiciens, parce qu’ils donnent de l’illusion pour détourner l’attention du public. » Ça s’appelle le mentir-vrai : quand survient un problème délicat - comme c’est le cas pour les Pandora papers au Congo-Brazzaville -, on s’empresse dans les médias où on invente un tas de raisons farfelues les unes que les autres, et même des chiffres faux ; on envoie celui qui a un bel accent et qui sait aligner les mots car plus l’accent est beau plus on le prend pour un éloquent ; on tente de convaincre les gens qu’en dehors d’eux il n’est point de salut, il suffit qu’il le dise bien pour qu’on le croit… Ce rôle d’homme qui a un bel accent, c’est Thierry Moungalla qui l'assume. Mais il ne suffit pas d’avoir un bel accent et d’aligner les phrases sans suite logique pour être convaincant, non. Encore faut-il de la gravité, du fond et du répondant. Et, de cela, Thierry Moungalla en manque. Qu’à cela ne tienne ! Il faut l’envoyer dans les médias qu’il a verrouillés pour débiter et chanter tel un perroquet des inepties mémorisées sur les Pandora papers. Objectif : sauvegarder l'honneur d'un homme qui ne le mérite pas, Denis Sassou-Nguesso. 

Au Congo-Brazzaville, les scandales financiers se succèdent et se ressemblent, sans que la presse locale ne les relayent... Ces scandales pointent du doigt les mêmes personnes, sulfureuses à souhait, en partie issues de la famille présidentielle. Si ce ne sont les enfants, c’est le père qui est cité dans des magouilles internationales : global witness, les biens mal acquis, panama papers, et plus récemment pandora papers. Ils sont dans tous les scandales financiers. Enfin, presque. Les Congolais n’ont plus qu’à faire le constat amer que leur argent se trouve dans les paradis fiscaux, planqués par les autorités politiques autoproclamées qui déclarent en même temps le pays en état de crise financière, ce qui les pousse à aller quémander de l’argent auprès des Institutions internationales. Même leur simple déclaration de patrimoine relève du miracle : ils n’en sont pas capables.    

Alors que la chaine publique de télévision française a révélé les pratiques financières douteuses de Denis Sassou Nguesso, voilà que son ministre Thierry Lézin Moungalla promet d’ester en justice tous les medias qui rependront l’information sur les pandora papers. Peine perdue. Les médias congolais n’existent quasiment pas. Quand bien ils eussent eu une once de liberté éditoriale, ils n’eussent pas traité cette affaire. Combien d'affaires de ce genre la presse congolaise a-t-elle déjà relayées ? Cette sortie de Thierry Moungalla révèle le degré de déliquescence de la presse congolaise. Quand il s'agit du retour de Jean-Marie Michel Mokoko, les Unes emphatiques pullulent. L'inspiration renaît de ses cendres. 

Pour revenir aux Pandora papers, il faut se féliciter de ce que la mafia congolaise a été dévoilée au grand jour par les médias étrangers. Et, en dépit de sa diatribe sur Télécongo, Thierry Moungalla, dans un propos décousu et destructuré, est apparu tel un orgue de barbarie qui ne convainc personne. Oui, c’est grâce à cette émission diffusée sur France 2 que le monde entier et les Français ont pu observer la triste réalité congolaise, et comprendre comment le régime de Sassou-Nguesso pille notre pays, pendant que les populations sont à l’abandon : les retraités sans pensions, les étudiants sans bourses, les fonctionnaires sans salaires depuis des lustres. Quant au système de santé, il est aux mains des charlatans. Une jeunesse livrée à elle-même, etc.

N'ayant convaincu personne, il a fallu venir en aide à Thierry Moungalla. Le Parti congolais du travail, constatant la communication du pouvoir illégal et illégitime calamiteuse, est alors entré dans la danse, avec des verbes dépourvus de performativité. Là aussi, échec et mat. Car si le PCT s'est indigné, il a en revanche envisagé seulement de porter plainte. C'est dire la difficulté dans laquelle le pouvoir de Brazzaville est encalminé dans cette affaire. Pourquoi vouloir voler au secours de l’empereur de pacotille par une déclaration inaudible et inappropriée? Tous les Congolais le savent : ce parti politique est coupable du naufrage de notre patrimoine commun, le Congo. Sauver Sassou, c’est comme espérer davantage de chaos.

Spécialiste des vols électoraux, Sassou Nguesso sait que ce mandat-ci est de trop. Le soi-disant empereur ne maitrise plus rien, sauf à enfermer ses opposants politiques dans des conditions indignes. Alors que Moungalla se vantait sur twitter du déplacement de la délégation congolaise au Fonds Monétaire International (FMI), là encore ce fut le drame. Le conseiller de SASSOU a vécu un moment de démocratie comme il en existe sous d’autres cieux, devant le parquet national financier dit ( PNF) chargé de traquer les grands délinquants en col blanc. Sa mise en examen signe par la même occasion le manque de sérieux face aux institutions internationales comme le FMI. Là encore, Moungalla prône une main noire puissante. Mais il oublie de se demander comment les autorités politiques congolaises peuvent prétendre recevoir une aide financière du FMI lorsque l’on sait qu’elles demeurent sourdes aux conditions exigées par cette institution.

La corruption active bat toujours son plein, et le gouvernement congolais se complait à ne rien faire.        

Finalement, le Congo est un pays qui s’éteint ; sa population descend progressivement dans l’enfer et ses prédateurs s’enrichissent illégalement dans l’impunité totale.

Jean-Raphael Oyabi, chargé de communication de l’ACB-J3M-France

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