
Dans une vidéo pour le moins grotesque, Sylvain Senda qualifie Charles Zacharie Bowao de « personnage pitoyable » et de « vermine-gangrène » qui corrompt la diaspora congolaise via le « groupe de Mpila », affilié à la plateforme IDC-Frocard. Mais il n’en apporte pas la preuve, pas plus qu’il ne nomme ceux que l’ancien ministre de la Défense a corrompus. Est-ce sérieux ? Coups de griffe.
Début juillet 2014, le Général Norbert Dabira, cité dans l’affaire dite des « Disparus du Beach » en France, soulève un incident de procédure devant la Chambre d’instruction de la Cour d’appel de Paris. Echec et mat. Les avocats de la partie civile, Maîtres Éric Pantou, Philippe Missamou ou leur consœur du Cabinet Baudouin, au sortir de l’audience, s’adressent à un groupe de Congolais compacts présents au Palais de Justice. C’est alors qu’avance Sylvain Senda, pour se faire photographier avec les trois avocats précités. Éric Pantou interroge Philippe Missamou : « Qui est cet homme ? D’où vient-il ? Pourquoi veut-il être sur la photo alors qu’il n’est pas concerné par la procédure ? » Gêné, Philippe Missamou répond : « C’est un confrère d’origine congolaise et il aimerait être sur la photo. » Pfff !
De cette attitude découle une caractérisation indirecte : Sylvain Senda est avide du « Matalana ». Oui, pour attirer l’attention, il est prêt à tout. Prêt à se livrer aux fanges de la calomnie. Il s'est inscrit au barreau de l'amou-propre : le fameux dédoublement réflexif par quoi il se préoccupe des opinions que les autres ont de lui. Ce faisant, il réalise des vidéos. Dans sa dernière production, le ton hautain et parfois moralisateur, déstructuré et décousu, il ressasse à qui veut l’entendre que « Sassou est celui-là même qui pille les richesses naturelles » du Congo ; que Sassou affame son peuple ; que Sassou a brisé l’école, etc. Rien de nouveau sous le soleil. Tous ces constats, sans valeur ajoutée, sont connus même des enfants. Où sont l’analyse et la stratégie ? Pis, il aboie des contrevérités : « Sassou a tué Adoua. » (sic) Vraiment ? S’il avait cherché, il aurait trouvé. Trouvé que le Général Adoua est mort de « maladie du siècle ». Sassou, qui écrabouille tout sur son passage, pouvait-il avoir peur du Général Adoua et de Ntsourou, au point de les liquider ? Une telle analyse serait farfelue. Sans doute le gangster Sassou ne les aimait pas ! Mais il ne les craignait pas non plus ! Et, en politique, on élimine la personne qu’on craint ; pas la personne qu’on n’aime pas. Soyons sérieux : au Congo Sassou ne craint personne ! Sinon il ne régnerait pas en maître absolu.
Il va sans dire que la rigueur intellectuelle ne caractérise pas l’avocat Sylvain Senda. Ok ! Charles Zacharie Bowao vient souvent en France. Mais au contraire de ce qu’il miaule - l’ancien ministre dispose d’un passeport diplomatique -, Charles Zacharie Bowao a la nationalité française depuis les années 90. A-t-il encore besoin d'un passeport diplomatique ? Il aurait dû chercher, toujours et encore, Slvain Senda. Hélas ! La paresse est l'une de ses bottes secrètes. Oui, dans sa tombe, Balzac jubile : « Certains bavards, et ceux-là sont des bavards de génie, ramassent les interpellations, les objections et les observations en manière de provision, pour alimenter leurs discours, comme si la source en pouvait jamais tarir. » Avec Senda, un professionnel du bavardage superfétatoire, on est dans la comédie. Une comédie d’autant plus insipide qu’il accuse sans apporter la preuve. Drôle d’avocat ! Quelles sont les personnes de la Diaspora que Charles Zacharie Bowao « entretient financièrement » pour le compte de Sassou ? Il ne suffit pas de balancer des paraphrases ou des anacoluthes forgées à coups de marteau pour être crédible ; il ne suffit pas de qualifier Bowao de « vermine-gangrène », de « personnage pitoyable », « d’esclave » ou « d’orfèvre de la corruption » pour être percutant. Encore faut-il dévoiler des noms, l'espace et le temps. Ainsi, son propos eût été beaucoup plus convaincant, à fortiori venant d’un avocat.
Au ras des pâquerettes
Incapable d’user du verbe transitif ou du complément d’objet direct, incapable de la moindre articulation discursive, Sylvain Senda est un réel imparfait du présent. Toutefois, il bénéficie de quelques circonstances atténuantes : il est à l’image de l’élite congolaise. C’est-à-dire au ras des pâquerettes. Se catapulter à la crête de l’apesanteur intellectuelle lui est difficile, pour ne pas dire impossible. La superficialité l'a même poussé à évoquer le mariage entre la fille de Bowao et le fils de Mboulou. En quoi le père est-il responsable des sentiments de son enfant ?
Les réseaux sociaux et le verbiage congolais sont des frères jumeaux. Et que si au Congo la parole est muselée, en France chez les Congolais elle est « humiliée ». Sylvain Senda a ceci de particulier qu’il alimente le fleuve des « égarements des contraires », pour reprendre ces mots de la philosophe Simone Weil dans son chef-d’œuvre La pesanteur et la grâce. Des pensées (si elles existent) non pas qui se superposent, mais qui se juxtaposent. Evidemment, c'est le gangster qui danse en voyant le spectacle lamentable qu'offrent les Congolais de France. « Les observations d'un sot apprennent jusqu'à quel degré de simplicité il faut descendre pour être compris de tous », constatait Napoléon. Non, Sylvain Senda n’est pas un « sot », puisqu’il est avocat. Mais son propos relève sinon de l’insulte, du moins de la sottise. Et il faut descendre à son niveau pour le comprendre.
Il oublie la tolérance, Sylvain Senda. Charles Zacharie Bowao a été ministre de Sassou ! Cela est irréfutable. Mais il a quitté le navire quand la consanguinité politique avec Sassou s’est éteinte. N’est-ce pas la marque d’une forte personnalité ? Autre question : l’avocat n’est-il pas celui qui se bat pour les droits des personnes, quelles qu’elles soient ? Dépourvu de talent aussi bien à l’oral qu’à l’écrit, il faut être mille fois cinglé pour s’attacher les services de Sylvain Senda. Non, cet avocat-là n’est pas comestible. Voilà !
Bedel Baouna