
Romancier atypique ou plutôt conteur hors pair, Gabriel Kinsa a cette faculté, ce don unique, d’apercevoir le monde d’avant sa naissance. Les statuettes et les masques sacrés, le lui permettent. Leur donner vie, du moins un sens, une voix, constitue l'une des levures, l’un des leviers, l’un des moteurs de sa vie.
Dans sa nouvelle BD, Nkisi, parue fin mars aux éditions Comme un Lézard, Gabriel Kinsa et Ded Latol nous embarquent au musée du Quai Branly où Nkisi – un fétiche – raconte sa vie, du moins ce qu’il est devenu après être parti de son territoire originel. « Je m’appelle Kiteki…Né des mains calleuses d’un artisan aux pieds nus et au regard mélancolique… Je suis né du vent dans les herbes… Je suis né du désert… de l’incernable… des paroles, des incantations et des enduits du nganga… » Ce nkisi est aussi appelé nkondi, pour faire peur. Il est ngo, le léopard, etc.
Mais, ici au musée du Quai Branly, les visiteurs oublient vite que, très souvent, les statuettes qu’ils admirent viennent de loin. « Je ne veux pas raconter mes voyages, ils furent tristes », avance nkisi aux visiteurs. Et d’ajouter : « Tant de caisses !... Tant d’emballages… Par égard pour mon âge… »
Les desseins de Ded Latol sont tout simplement époustouflants et retranscrivent remarquablement les scènes. Même sans paroles écrites, on comprend de quoi il s’agit. Didactiques, les mots sont solidaires d’une recherche spirituelle. Les élever, en somme, à d’autres dimensions. C'est là toute l’essence de l’écriture de Gabriel Kinsa :
Bedel Baouna (Dandy pamphlétaire)